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Quand Moussa Mara se fait lyncher par ses militants

En plongeant tête baissée dans le débat sur l’interdiction des gros porteurs dépassant 17,5 m, l’ancien Premier ministre Moussa Mara, espérant sans doute montrer son esprit « management public », a plutôt déclenché un véritable lynchage de la part de ses propres militants. Plutôt que de défendre la pugnacité nécessaire pour appliquer une réforme exigeante, il s’est attiré les foudres de ceux qui exigent rigueur et cohérence — une sortie ratée qui illustre le fossé grandissant entre déclarations opportunistes et réalités du terrain.

Contexte de la mesure


Le gouvernement malien a officiellement interdit, à compter du 1ᵉʳ avril 2025, la circulation des camions gros porteurs dépassant les normes de gabarit sur l’ensemble du réseau routier national, conformément au Décret n° 2023-0509/PT-RM du 12 septembre 2023 . Cette décision s’inscrit dans le cadre du Règlement n° 14/2005/CM/UEMOA relatif à l’harmonisation des normes de gabarit, de poids et de charge à l’essieu des véhicules lourds de transport de marchandises dans les États membres .

Les dimensions maximales désormais en vigueur sont :
Longueur : 16,5 m pour les véhicules articulés
Largeur : 2,55 m
Hauteur : 4 m

Ces restrictions, peaufinées lors de réunions entre ministères, transporteurs et transitaires, visaient à préserver l’intégrité des routes financées à grands frais et à éviter leur dégradation prématurée par des charges excessives .

Sortie ratée de Moussa Mara et réactions des militants


Le 22 avril 2025, Moussa Mara a publié un communiqué pressant le ministère des Transports de « laisser entrer les camions hors gabarit » et d’accorder un nouveau délai de mise en conformité, arguant que « la pédagogie doit aussi faire partie de notre management public ».
Or, sur les réseaux sociaux, cette requête a été perçue comme un reniement des efforts de sensibilisation et de concertation antérieurs. 

Parmi les réactions les plus virulentes :

« Toujours là à vouloir contredire 🤮 la décision des autorités et quand les routes vont se gâter c’est pour venir nous casser les oreilles encore ! Le délai qu’on leur avait donné c’était pourquoi ???? »

« Monsieur Mara, avec tout le respect que je vous dois, je ne partage pas votre avis : le ministère a donné un délai largement suffisant. La rigueur fait partie du développement. »

« Mara, on ne peut pas faire l’omelette sans casser des œufs. Vous critiquez même quand les décisions sont favorables à la population. »

Ces commentaires, issues de fils de discussion sur Twitter et Facebook, traduisent la désillusion de militants qui estiment que l’ancien PM a manqué de solidarité et de constance avec les lignes directrices qu’il avait lui-même soutenues.

Pourquoi la fermeté reste nécessaire

Protection des infrastructures : Les dimensions et charges imposées limitent l’usure kilométrique des routes et protègent les ponts et passages à gué .
Équité entre acteurs : Accorder de nouveaux délais créerait un sentiment d’impunité chez certains transporteurs, nuisant à la compétitivité de ceux qui ont investi pour se mettre en conformité .
Préservation des finances publiques : Des réparations routières anticipées coûtent plus cher que la modernisation des flottes et la mise en place de contrôles, à terme .
Si la mesure d’interdiction des gros porteurs dépasseurs de gabarit peut paraître brutale, elle est le fruit d’un long processus de concertation et d’une volonté affirmée de protéger un patrimoine collectif fragile. Plutôt que de céder à la facilité d’un rétropédalage opportuniste, il convient d’accompagner les transporteurs par un dispositif clair d’appui technique et financier – mais sans sacrifier l’exigence réglementaire qui garantit l’équilibre entre développement économique et durabilité des infrastructures.

B. TRAORÉ pour Kalux FM